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Photo du rédacteurCynopolis Elsa Weiss

Mon chien ne supporte pas de rester seul !

Aboiements intempestifs, hurlements, destructions, auto-mutilations, pipis/cacas artistiquement éparpillés dans le salon… ça vous parle ? Si votre chien présente l’un ou l’autre de ces comportements en votre absence, c’est certainement parce qu’il souffre de la solitude. Si je précise « certainement », c’est parce que la solitude n’est pas la seule cause de ces comportements gênants. Quoiqu’il en soit, il s’agit de l’une des causes d’abandon les plus courantes. Je vous propose un petit point sur le sujet.


Le chien est un animal social. Contrairement à l’idée reçue qui a la vie dure encore aujourd’hui, il ne vit pas en « meute » (le terme ne peut pas s’appliquer au chien, d’un point de vue éthologique), mais il a un besoin indéniable d’entretenir des contacts sociaux, avec des humains et/ou d’autres chiens. La plupart des chiens sont capables de rester seuls quelques heures par jour, mais aucun ne peut supporter de longues heures de solitude sans souffrir (mention spéciale aux entreprises et aux particuliers qui font l’acquisition de Malinois pour monter la garde sur des terrains vides : privés de contacts sociaux réguliers, ces pauvres chiens deviennent complètement toqués avec le temps, et cette pratique semble se démocratiser, hélas…). Votre compagnon peut donc apprendre à vous attendre quelques heures pendant que vous êtes au travail, mais il ne s’agit pas d’en abuser. On ne prend pas de chien quand on s’absente douze heures par jour : outre le fait que la vessie de l’animal n’est pas faite pour supporter une rétention d’urine aussi longue, il s’agit d’une forme de maltraitance passive. Douze heures une fois, cela peut arriver à tout le monde : mais supporter douze heures de solitude par jour cinq jours sur sept, c’est totalement contre-nature pour un animal social. D’autant que beaucoup de chiens n’ont même pas la possibilité de faire des activités intéressantes au retour de leurs maîtres.


Le terme « anxiété de séparation » est un peu abusif : on ne devrait utiliser cette expression que pour désigner les chiens anxieux quand il sont séparés de leur humain d’attachement, et cela même si d’autres personnes sont présentes à la maison. Dans la plupart des cas, il s’agit surtout d’anxiété liée à la solitude. Mais pas que : certains chiens font des dégâts à la maison tout simplement parce qu’ils manquent de dépense physique. Trop peu sortis et stimulés, ils débordent d’énergie au moment du départ au travail de leur propriétaire. et il faut bien qu’ils trouvent un moyen de l’évacuer : en creusant des tranchées, en rongeant les pieds de la table ou le canapé, ou en aboyant toute la journée. Les sortir davantage, en se levant plus tôt le matin pour faire une bonne promenade, et en leur fournissant de l’activité masticatoire pendant les heures de solitude, permet souvent une nette amélioration de la qualité de vie du chien, et de celle du maître par la même occasion.


Il arrive aussi que certains chiens aient associé le fait de rester seuls à la maison avec quelque chose d’anxiogène : par exemple, des travaux bruyants ayant eu lieu dans le voisinage, un orage, ou des aller-retours incessants dans l’allée d’à côté ou dans le couloir de l’immeuble. Ils se sentent alors en insécurité quand il sont laissés seuls, alors qu’ils supportaient plutôt bien la solitude auparavant. Un aménagement de l’environnement de manière à apporter davantage de tranquillité au chien, donne généralement de bons résultats.


Les races de chiens qui apprécient particulièrement la vie de groupe, et qui ont été sélectionnées pour travailler en collaboration avec des congénères, comme les chiens de traîneau ou les chiens courants (le plus représenté en tant que chien de compagnie étant le Beagle), ou, dans un autre registre, les chiens-loups, qui expriment encore des traits comportementaux issus de leurs ascendants sauvages, peuvent avoir beaucoup plus de mal que d’autres races à supporter de rester seuls. Dans leur cas particulier, l’adoption d’un second chien peut aider, mais le pour et le contre d’une telle décision doivent être savamment pesés.


Enfin, il y a beaucoup de chiens qui souffrent d’un problème de rythme plutôt que d’un problème de solitude : par exemple, les chiens appartenant à des personnes actives aux horaires irréguliers, ou ceux qui bénéficient de beaucoup d’activité le week-end, et très peu la semaine. Essayer d’établir un programme d’activités relativement homogène sur toute la durée de la semaine, quitte à faire intervenir quelqu’un pour sortir Médor, peut grandement aider ce type de chien à acquérir des repères temporels et à se sentir mieux dans ses pattes. D’autres, comme mon American Staff Farouk, tolèrent bien la solitude chez eux, mais ne supportent pas d’être laissés sans leur maître dans un endroit différent de leur lieu de vie. Il convient donc de prendre chaque cas individuellement, et de ne pas faire trop de généralités.


Si votre chien détruit, vocalise ou fait ses besoins dans la maison en votre absence, il est indispensable de traiter les causes du problème, et non pas ses symptômes. Mettre une muselière ou un collier anti-aboiements à votre chien, ou l’enfermer dans une cage pendant toute une journée de travail vous aidera généralement à VOUS sentir mieux, mais ne traitera aucunement le problème de fond, et pire, accroîtra l’anxiété de votre chien. Il existe d’autres méthodes pour aider votre compagnon à tolérer la solitude : il n’en sera jamais un fan de la première heure, mais il pourra l’accepter au moins quelques heures par jour.


Tout d’abord, accorder à votre toutou de l’activité de qualité TOUS LES JOURS pendant vos heures de présence, est indispensable, et cela pour tous les chiens. Dans l’idéal, Toutou devrait être sorti en extérieur le matin avant votre départ (le VRAI extérieur, pas le jardin, aussi grand soit-il) afin d’être fatigué physiquement pour une partie de la journée. Pour le stimuler mentalement, rien de mieux que des jeux d’occupation que vous lui donnerez au moment de votre départ : vous trouverez plein d’idées sur Internet pour occuper votre chien la journée avec trois bricoles (ne jetez pas vos rouleaux de PQ, malheureux !). Si votre chien aime mastiquer, ne l’en privez pas : observez quelles sont les matières qu’il préfère mâchouiller (bois, carton, caoutchouc, os…) et essayez de lui en procurer. Mieux vaut avoir un peu de ménage à faire en rentrant, qu’un trou dans le mur à reboucher (oui oui, cela s’est vu !).


Exit la vieille « méthode » qui consiste à ignorer totalement votre chien avant de partir au travail : une petite phrase du genre « Tu es sage, je reviens » dite sur un ton léger, est souvent plus apaisante pour l’animal qu’un silence radio vingt minutes avant le départ du maître. Bien entendu, le chien n’en comprendra pas le contenu, mais il associera progressivement ces sonorités à votre absence certes, mais à votre retour ensuite, et aussi à toutes ces choses intéressantes que vous lui laisserez pour s’occuper pendant ce moment de solitude.


Enfin, pour la 165 786ème fois, il est INUTILE et CONTREPRODUCTIF de gronder votre chien s’il a fait des dégâts pendant votre absence. Non, non et non, il ne se sent pas coupable, même s’il baisse la tête et vous regarde avec toute la misère du monde dans ses yeux. Le chien n’est pas capable d’élaborer ce schéma mental. S’il a l’air penaud, c’est avant tout parce qu’il a associé votre retour à de la colère, ou qu’il perçoit votre tension à votre retour à la maison. En le grondant, vous ne ferez que le rendre plus anxieux, et vous augmenterez le risque de le voir faire des « bêtises ».


J’aurais encore beaucoup de choses à vous dire sur l’anxiété liée à la solitude. C’est un thème vaste et complexe, et une problématique qui parfois, se traite en une simple séance, et dans d’autres cas, demande davantage de temps. Dans tous les cas, il est important de bien analyser la cause du mal-être du chien, et ce n’est pas toujours aussi simple qu’on pourrait le penser. Mais, correctement prise en charge, l’anxiété liée à la solitude trouve presque toujours une solution. Et elle ne justifie certainement pas un abandon.


Elsa Weiss / Cynopolis

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