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Photo du rédacteurCynopolis Elsa Weiss

Les chiens de protection des troupeaux

Les vacanciers qui apprécient la randonnée en montagne les ont sûrement déjà croisés, ces gros chiens qui accompagnent les troupeaux lors de la saison d’estive. Ils sont chargés de la protection du bétail contre les prédateurs : loups principalement, mais aussi ours ou lynx, selon le secteur où pâture le troupeau. Leur carrure impressionnante et leur voix caverneuse qui porte jusqu’en haut des cimes dissuade généralement les curieux de s’approcher du bétail. Ce sont les chiens de protection, qui déchaînent les passions depuis le retour des grands prédateurs en France.


On les nomme parfois « Patous », même si ce terme est employé à l’origine pour désigner le Montagne des Pyrénées, ce colosse au pelage blanc tacheté (la couleur entièrement blanche ayant été favorisée par les Français lorsque ce dernier a commencé à devenir un chien « de compagnie »), probablement le plus connu de tous les chiens de protection. Il existe cependant de nombreuses autres races, venues principalement d’autres pays d’Europe au relief montagneux, ou d’Asie (le Berger de Maremme, le Cão de Gado Transmontano, l’Estrela, le Mâtin Espagnol, mais aussi le Berger d’Anatolie -le fameux « Kangal »- l’Alabai, le Berger du Caucase, etc). Si ce n’est l’appellation de « chiens de berger », les chiens de protection n’ont rien à voir avec les chiens de conduite (Border Collie, Berger Australien, Berger d’Auvergne, Berger des Pyrénées, Berger de Crau, Huntaway, etc), qui, comme leur nom l’indique, aident au déplacement et au rassemblement du bétail.


Il n’est pas évident de trouver de bonnes lignées de chiens de protection en France, et la plupart ne sont pas inscrites au LOF, à juste titre. La sélection des chiens de race dans notre pays étant essentiellement basée sur l’aspect physique de l’animal, beaucoup de Patous que l’on rencontre actuellement n’ont plus l’instinct de protection des troupeaux. Ce mode de sélection s’est avéré catastrophique avec le retour du loup, car il est désormais difficile de trouver de bonnes lignées de Patous de travail, et ce sont souvent des éleveurs « en marge » qui produisent des chiens véritablement capables de travailler, nés en exploitation et vendus à d’autres éleveurs.


La cohabitation entre chiens de protection et touristes est un sujet délicat. Si certains chiens de protection restent essentiellement avec leur troupeau, d’autres ont dans leurs gènes l’instinct de « patrouiller » tous les jours pour inspecter et marquer la zone qu’ils protègent avec leur urine. Ils ne sont pas en divagation, et leur comportement est normal, mais il est certain que croiser ce type de chien au détour d’un sentier peut surprendre.

Si vous croisez un chien de protection, et de surcroît si ce dernier aboie dans votre direction, la pire chose à faire serait de le menacer, en criant ou en employant un bâton. Essayez autant que possible de contourner le troupeau le plus largement possible, tranquillement. Si le chien s’approche de vous, et même s’il vous paraît menaçant, arrêtez-vous et laissez-le vous inspecter. Il veut simplement vous identifier. Vous pouvez tout à fait lui parler gentiment, mais ne le caressez pas (on ne caresse pas un chien inconnu, de toute façon). Une fois qu’il aura cessé de vous renifler, repartez calmement. Si vous êtes accompagné de votre chien, lâchez-le pour que la rencontre entre les deux animaux se passe avec le moins d’intervention humaine possible.


Il est certain que la cohabitation entre les chiens de protection et les touristes n’est pas évidente. Un chien de cette taille qui arrive droit sur un randonneur en le menaçant peut constituer une expérience traumatisante pour ce dernier. Malheureusement, à ce jour aucune solution « miracle » pour que les touristes et les chiens de protection fassent bon ménage n’a été trouvée. Il en va de la responsabilité de chacun : celle du berger qui est en charge de son troupeau et des chiens de protection, mais qui ne peut pas avoir un œil partout et qui ne peut pas contrer leur côté naturellement indépendant (d’autant qu’il ne s’agit pas des chiens du berger mais de ceux de l’éleveur) ; et celle des utilisateurs de la montagne qui doivent accepter la présence de ces gros canidés et adopter les bons gestes en leur présence.


Enfin, les chiens de protection, le Berger d’Anatolie plus particulièrement, commencent à intégrer les foyers français en tant qu’animaux de compagnie. Si une petite minorité d’entre eux peut s’accommoder d’une vie citadine, il convient de ne pas oublier les origines de ces chiens. À mes yeux, les chiens de protection ont réellement besoin d’espace, et se promener en laisse en milieu urbain, ainsi que voir passer du monde toute la journée derrière la clôture de leur jardin, peut être stressant et frustrant pour eux. Rien d’étonnant à ce qu’ils développent de l’agressivité, qu’ils aboient toute la journée ou qu’ils sautent par-dessus la clôture pour charger le facteur qu’ils ont déjà prévenu 150 fois de ne plus venir toucher les limites de la zone qu’ils protègent.


Une chose est sûre : les chiens de protection constituent à ce jour la seule solution viable pour protéger les troupeaux contre les prédateurs. Si l’on est favorable à la présence du loup, du lynx ou de l’ours en France, accepter également celle des chiens de protection me paraît inévitable.


Elsa Weiss / Cynopolis

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