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Photo du rédacteurCynopolis Elsa Weiss

Gérer son environnement, c’est important pour lui aussi

Quand je suis anxieuse, il n’y a qu’une chose qui m’apaise vraiment : faire le ménage. Je range l’appartement, je le nettoie, et je me sens instantanément soulagée. Je pourrais boire un verre de whisky, mais je suis trop souvent anxieuse pour prendre ce risque : en moins de deux mois, je deviendrais accro. Alors je range. Et pouf ! Mon angoisse disparaît, pas pour longtemps certes, mais suffisamment pour me permettre de retrouver des idées claires et de repartir d’un meilleur pied. Si l’on m’en empêchait, j’en souffrirais énormément. Vous trouvez cela étrange ? Pourtant, c’est un comportement relativement courant. Et chez les animaux également -d’ailleurs, n’oublions jamais que nous en sommes- la possibilité de gérer autant que possible son environnement abaisse le niveau d’anxiété globale de l’individu.


J’ai connu un chien qui souffrait de détresse liée à la solitude -comme beaucoup d’individus canins. Il stressait énormément quand il se retrouvait seul, et par crainte qu’il ne fasse des dégâts dans toutes les pièces, son propriétaire l’enfermait dans le salon quand il devait s’absenter. Un jour, ce dernier oublia de fermer la porte de sa chambre. À son retour du travail, il retrouva son chien allongé sur son lit, à moitié endormi et l’air apaisé. Le fait d’avoir accès au lit, imprégné de l’odeur de son humain et bien plus confortable, il faut l’avouer, que le panier du salon, lui avait apporté un réconfort inattendu. Depuis, son propriétaire le laissa accéder à sa chambre en son absence, et le problème d’anxiété du chien guérit presque complètement, grâce à la possibilité de gérer son environnement. Bien entendu, tous les problèmes de détresse liée à la solitude ne se résolvent pas aussi facilement, mais le cas sus-cité donne à réfléchir.


Comme beaucoup d’éducateurs/trices, j’ai longtemps conseillé l’emploi de la cage à mes débuts. Je pensais qu’elle pouvait être un bon outil pour apprendre au chien à rester seul progressivement. En réalité, elle ne rendait véritablement service qu’à l’humain, et non au chien. Même si ce dernier allait parfois se coucher dans sa cage avec plaisir, elle ne lui enseignait rien. Il s’agissait juste d’une solution palliative. Quand je m’absente, je retrouve mes chiens calmes, mais toujours couchés à des endroits d’où ils peuvent avoir une vue sur la porte. C’est une façon pour eux de gérer leur environnement comme ils le souhaitent : pouvoir guetter mon retour les apaise et leur permet justement de pouvoir rester sereins quand ils sont seuls.


De même, un chien réactif tenu en laisse courte ne peut pas gérer son environnement. Il ne peut pas s’éloigner de ce qui le met mal à l’aise, il peut se sentir coincé et se montrer d’autant plus agressif, il n’a pas la possibilité de choisir parmi tout l’éventail de comportements que la liberté lui autoriserait. Évidemment, il est inconcevable de lâcher un chien réactif dans la nature et de le laisser se débrouiller avec les chiens ou les humains qu’il croise. En revanche, offrir davantage de liberté contrôlée à l’animal par le biais d’une longe, c’est lui proposer de pouvoir gérer lui-même son environnement -avec votre aide pour le renforcer dans ses « bons » choix- en lui offrant le choix parmi tout un panel de comportements, qu’il ne pourrait pas proposer s’il était tenu en laisse courte.


Restreindre le libre mouvement d’un individu peut être une solution ponctuelle dans certaines situations précises -en utilisant la cage pour le transport routier, par exemple- mais ne constitue pas une méthode d’éducation. Pour n’importe quel animal, avoir la possibilité de gérer son environnement -choisir de fuir, d’observer, de s’approcher, de s’approprier un lieu de couchage, de prendre de la distance- est indispensable à son équilibre. Difficile à appliquer en ville, certes, où l’on est contraint d’évoluer dans des endroits exigus, de croiser des humains et des chiens sur un même trottoir, et où l’on est souvent obligé de garder son chien très près de soi, mais, même par petites touches, apporter un peu de choix et de liberté de mouvement à son compagnon, c’est contribuer incontestablement à améliorer son bien-être. À mes yeux, l’une des pires souffrances que l’humain a jamais infligée à un animal, c’est la restriction de mouvement que subissent les animaux de batterie : ces truies bloquées dans des cases qui les empêchent de se retourner, ces veaux logés dans des niches alors que les bovins sauvages évoluent sur des territoires immenses, constituent le summum de la cruauté.

Les chiens sont, pour la plupart, mieux lotis que les animaux « de rente », mais nous avons encore du chemin à faire pour leur accorder davantage de possibilités de gérer leur environnement. Vous serez surpris de constater qu’ils savent bien souvent prendre des décisions pertinentes !


Elsa Weiss / Cynopolis

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